Mais que fait donc ce couple avec de drôles de lunettes démesurées sur le nez dans le hall de l’hôtel ? Pendant que d’autres lisent le journal, eux visitent la pyramide de Kheops ! Et cette femme plantée depuis 20 minutes avec passion devant « Guernica » ? Ses lunettes l’immergent en pleine guerre d’Espagne, aux côtés de Picasso ! Et cet homme qui va et vient devant le comptoir d’une agence de voyage parisienne ? Il visite en 360° sa future chambre d’hôtel à Tokyo ! Science-fiction ? Pas du tout, ces applications existent bel et bien et sont déjà des opportunités pour nombre d’acteurs du tourisme. Et ce, grâce à 2 hautes technologies qui se complètent : la réalité virtuelle et la réalité augmentée.
Quand le tourisme se met à la réalité virtuelle et augmentée
La réalité virtuelle et augmentée pour inspirer les voyageurs et les informer
La réalité virtuelle repose sur l’assemblage d’images de synthèses en 3D, crées par ordinateur à partir du réel. Elle donne à l’utilisateur l’impression d’être vraiment dans le lieu ainsi reconstitué, au point de pouvoir s’y déplacer comme un promeneur lambda découvrant de nouveaux détails dès qu’il lève ou tourne la tête : on parle alors d’immersion à 360°. L’interêt de cette technologie: immerger complètement l’utilisateur jusqu’à flouter la frontière entre réel et virtuel.
La réalité augmentée permet d’appliquer à des éléments du réel dotés d’un émetteur ou reconnus par l’application (une œuvre d’art, un bâtiment, etc.) des éléments externes : une vidéo ou un texte audio, par exemple.La volonté derrière la réalité augmentée est contrairement à la réalité virtuelle, de ne pas enfermer l’utilisateur dans un environnement virtuel, mais d’ajouter une couche d’informations.
La combinaison des deux (réalité mixte) augmente la réalité avec des images de synthèses en 3D : par exemple, pour un monument, une reconstitution de ce qu’il a pu être à une autre époque.
Loin d’avoir été adoptées en masse, la réalité virtuelle, augmentée et mixte présentent un grand potentiel, que ce soit pour inspirer les voyageurs ou les informer. Appliquées au secteur du tourisme et du voyage, ces techniques offrent une expérience immersive unique au touriste. Et ce, à toutes les étapes du cycle de son escapade. La preuve en quelques exemples concrets…
Réalité virtuelle et augmentée : ces technos qui enrichissent chaque étape de l’expérience voyageur
Avant le voyage : l’immersion comme outil de promotion
Le Club Med pour ses villages ou encore New Caledonia Tourism pour la Nouvelle-Calédonie, permettent aux agences dotées de casques de réalité virtuel de faire découvrir à leurs clients leur destination via Youtube 360° et Facebook 360°. A plus petite échelle, on peut faire visiter des chambres d’hôtel avant réservation : c’est ce que proposent de grandes chaînes hôtelières comme Marriott ou Western Union, ou encore le voyagiste Expédia. La visite avant de choisir est une solution facilement déclinable pour attirer des clients vers des sites et des activités culturelles ou sportives.
Pendant le voyage : visite sous-marine avec Eurostar ou ciné panoramique en vol
Depuis plus d’un an Eurostar propose à ses clients de visiter les fonds sous-marins durant la traversée de La Manche. Pas par les vitres (qui donnent sur un tunnel), mais grâce à la réalité virtuelle. La start-up française Skylights prépare quant à elle, pour les compagnies aériennes, des casques à louer à chaque passager : fini le mini écran secoué par les rires de celui devant soi, désormais cette solution l’immerge dans une salle de ciné avec écran panoramique. De semblables casques, prêtés cette fois car sponsorisés, pourraient favoriser aussi la promotion en vol de destinations ou d’activités !
Pendant le séjour : villes, monuments et musées rivalisent d’applis en réalité virtuelle ou augmentée
L’Office de tourisme de Bordeaux, par exemple, propose un iPad pour une visite en réalité augmentée de la ville. Plus nostalgique, Le Havre fait revivre à ses visiteurs et habitants la ville d’avant sa destruction par les bombardements, grâce aux bornes de réalité virtuelle de la société Timescope.
Côté musées et monuments, les visiteurs du Detroit Institute of Arts peuvent découvrir le monument commandé par Nabuchodonosor, via une appli de réalité augmentée. Cette même techno combinée à la réalité virtuelle ajoute en magie à la visite de la Casa Battlo à Barcelone. Idem pour l’expo « Magritte » qui s’est déroulée à San Francisco à l’automne 2018. Et les exemples commencent à foisonner…
Après le voyage : du partage en 360° qui pêchent encore en qualité !
Les technologies Youtube 360° et Facebook 360° permettent désormais aux voyageurs de partager leurs expériences en 360°, grâce à des caméras embarquées par des drones, proposés en location par certaines destinations qui ont su saisir cette opportunité. Certes, ces films immersifs sentent encore beaucoup l’amateurisme…
Le voyage à domicile : du bonheur pour tous, avec les remerciements de la planète
In fine, il est même désormais possible de voyager sans bouger de chez soi, comme l’explique un article de Madame Figaro publié en août 2018. Au-delà de l’effet de mode, réalités virtuelle et augmentée pourraient apporter énormément à des personnes en situation de handicap, par exemple, ou d’un âge avancé, en leur donnant à vivre des sensations touristiques inoubliables. A envisager aussi : une contribution très pertinente de ces technos à la préservation d’environnements ou d’écosystèmes fragiles, qu’on pourrait fermer au public réel mais ouvrir à un très large public virtuel.
On l’a vu, la réalité virtuelle, augmentée et mixte sont encore loin d’être démocratisées. il faudra encore du temps, pour que la technologie s’améliore et que les marques créent de réels services. Les réalités virtuelles, augmentée et mixte ont toutes les trois leur place dans les secteurs du Tourisme et de la culture, chacune à un usage bien spécifique. La réalité virtuelle pour inspirer les voyageurs avant de partir ou reconstituer des oeuvres d’art, la réalité augmentée pour ajouter une couche d’informations durant les déambulations des touristes et la réalité mixte pour former et accompagner les employés dans un contexte plus industriel.
Catherine Terrand